Egérie de Terrence Malick (Une vie cachée), connaisseuse du Luxembourg via sa prestation dans Egon Schiele (Amour Fou, 2016), la comédienne autrichienne primée Valerie Pachner revient sous nos frontières pour siéger au sein du jury international du LuxFilmFest.
LuxFilmFest Le visionnage d’un film diffère-t-il lorsque vous faites partie d’un jury et lorsque vous le regardez pour le plaisir ?
Valerie Pachner : J’essaie d’avoir deux facettes en moi lorsque je fais partie d’un jury. L’une regarde pour le plaisir, car cela me permet de savoir si un film me procure de la joie et de garder cet espace émotionnel ouvert. Je me prête parallèlement à une vision plus analytique de l’œuvre. Je garde enfin une vision plus large, pour apprécier la sélection dans son ensemble. En tant qu’actrice, même dans la vie quotidienne, je fais un peu la même chose: je suis une spectatrice qui veut être divertie, mais il y a forcément des moments où je ne peux pas m’empêcher d’imaginer à quoi une scène aurait ressemblé sur le plateau.
LFF: Vous avez été nominée et avez remporté des prix dans le monde entier. Que signifie cette reconnaissance pour vous? L’Art doit-il être une compétition?
V.P : Je ne limite pas les festivals à une compétition. Je les vois avant tout comme une plateforme et une joyeuse rencontre entre cinéastes. Il y a peut-être une certaine résistance à l’idée de compétition dans l’Art, mais j’ai toujours aimé la manière dont les festivals honorent le cinéma. Cela manque dans le monde du cinéma. Au théâtre, il y a cette rencontre directe avec le public. Je pense que la compétition fait partie de la nature humaine, donc elle apporte une certaine excitation. Tant que vous voyez cela comme un jeu et que vous reconnaissez que tous ces films sont méritants, c’est bénéfique.
LFF: Vos personnages traversent souvent des épreuves émotionnelles très intenses. Est-ce quelque chose que vous recherchez dans un scénario?
V.P. : Choisir un scénario, c’est un mélange de choses, cela peut concerner le ou la réalisateur·trice et ce que l’histoire veut raconter. Mais si j’ai également la chance de me challenger en tant qu’actrice, d’avoir un rôle dans lequel je peux m’investir profondément, alors c’est parfait. Même avec des personnages secondaires, j’aime trouver ce que je veux transmettre à travers eux, presque comme s’ils vivaient dans un petit monde à part.
LFF : Vous avez notamment travaillé avec Nele Mueller-Stoefen [pour Delicious, présenté au Festival de Berlin cette année] et Maria Schrader, une autre actrice devenue réalisatrice. Avez-vous envisagé de devenir réalisatrice?
V.P. : Pour être honnête, je ne m’y suis pas encore intéressée. Je pense que cela demande énormément… il faut savoir tellement de choses et il y a tant de responsabilités. En tant qu’actrice, je pense que j’ai la meilleure partie du processus de création d’un film, bien que certain·e·s monteur·euse·s ne seraient peut-être pas d’accord. Être sur un plateau, surtout pour les petits films indépendants, est intense et un lien se noue en peu de temps avec ce groupe de personnes. Ce n’est pas une vie ordinaire.
Interview de Duncan Roberts